De la Déficience, de l’Incapacité et le travail

Le terme « déficience » est souvent utilisé de manière inopportune et inappropriée. La « déficience » relève en médecine et en psychologie de l’insuffisance organique ou psychologique ; de l’insuffisance ou l’absence de fonctionnement d’un organe. Ainsi, il suffit qu’un organe soit mis en déficience pour que son fléchissement se répercute sur l’ensemble (J. Rostand, Vie et ses probl., 1939, p. 122).

Incidemment, en perspective du Trouble d’Hyperactivité avec/sans déficit de l’Attention, l’Attention, par exemple, joue un rôle prépondérant dans le développement de plusieurs fonctions importantes du cerveau, et conséquemment, sur le développement de la personne (apprentissage) et de la santé (développement). Une attention déficiente peut entraîner divers dysfonctionnements développementaux des fonctions cognitives et exécutives du cerveau. Qui plus est, la présence d’altérations mineures de certaines régions du cerveau entraîne divers dysfonctionnements fondés sur une (dys)synchronie des fonctions organiques, exécutives et cognitives du cerveau.

Conséquemment, une « déficience » ne peut être réparée, mais seulement être compensée ou optimiser, par des stratégies d’adaptations-réadaptations, des stratégies d’accommodations, des stratégies d’adaptations, des stratégies de remédiation cognitives, etc.

La « déficience » est donc est une faiblesse plus ou moins grave (nuisant au bon fonctionnement) et qui ne peut jamais vraiment être réparer, ou corrigés, ou remis en bon état de fonctionnement, car on ne peut supprimer ou atténuer les conséquences fâcheuses de l’absence, ou d’une diminution, de quelque chose. Une « déficience » est une « perte de substance ou altération définitive ou provisoire, d’une structure ou fonction psychologique, physiologique ou anatomique. » Elle ne peut être remplacée.

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Avec la parution de la Classification Internationale du Fonctionnement, du Handicap et de la Santé (CIF, CIH-2), l’OMS a introduit une nouvelle typologie de la situation de handicap qui prend aussi en compte les facteurs environnementaux et les aspects sociaux.

La situation de handicap peut y être définie comme la rencontre d’une « incapacité » (ou plusieurs incapacités) avec une situation de la vie quotidienne. Ces deux composantes sont soumises à l’influence de problèmes de santé (santé mentale, maladies, blessures, lésions) et de facteurs contextuels (environnement et personnels).

On distingue les activités, qui désignent l’exécution d’une tâche et les participations qui désignent le fait de prendre part à une situation de la vie quotidienne. Les situations de vie consistent donc à mettre en œuvre à la fois des savoir-faire et des savoir-être. Une situation de handicap relève de l’ensemble des difficultés rencontrées par un individu pour réagir à une situation de vie en raison de ses déficiences. Pour mesurer ces difficultés, on différencie la notion de performance de celle de capacité (incapacité). La performance mesure la réponse d’un individu à une situation de vie dans son environnement réel, alors que la capacité mesure l’aptitude d’un individu à répondre à cette même situation dans un environnement normalisé.

La situation de handicap tient plus du désavantage social (égalité des chances) résultant d’une déficience ou d’une incapacité qui limite ou interdit l’accomplissement d’un rôle normal. Incidemment, les déficiences sont souvent liées aux incapacités.

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Les raisonnements erronés fréquents concernant la déficience et l’incapacité psychologique reposent sur l’admission de l’existence d’un modèle linéaire entre le trouble et la déficience ainsi qu’à l’assimilation que les symptômes à elle seule participent aux limites fonctionnelles. Incidemment, on néglige fréquemment les facteurs environnementaux et contextuels liés, par exemple, au lien de travail dans l’évaluation de la capacité de travail.

Dans une vision évaluation réductrice, on confond l’incapacité professionnelle et l’incapacité générale doublée d’incapacité de répondre aux exigences personnelles et sociales. Une incapacité entraîne nécessairement une situation de handicap en milieu de travail et nécessite nécessairement des stratégies d’adaptation et d’accommodations. On accorde, hélas, une confiance excessive à des méthodes et des outils peu fiables dont la validité prédictive (écologique) est inconnue. De plus, une absence de normes et de lignes directrices uniformisant l’évaluation de l’incapacité en milieu de travail mine souvent la possibilité d’adaptation et de motivation du Sujet, et la détermination de l’incapacité professionnelle. On réduit donc l’incapacité à celle du manque de motivation, et non pas à l’adaptation fonctionnelle de l’individu. Cependant, les facteurs psychosociaux jouent un rôle prédominant dans l’incapacité et la disposition à reprendre le travail.

Ainsi, il y aurait une absence d’une définition claire de l’incapacité professionnelle, et une déficience des stratégies écologique et ergonomique de l’adaptation fonctionnelle.

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La CIF-2 propose un modèle écosystémique prenant en compte les aspects environnementaux de l’incapacité. Cependant, il existe un grand nombre de modèles conceptuels de l’incapacité. Mais la recherche transdisciplinaire progresse de façon limitée. Les chercheurs, intervenants et employeurs privilégient certaines variables de l’incapacité en fonction de leurs priorités. En termes de gestion de la complexité, la tâche est complexe entre approches normalisées et approches au cas par cas. Également, les cliniciens et praticiens se voient imposer des paradigmes juridiques, et la polarisation et la politisation du domaine de l’incapacité, sorte de carcans, limitent d’autant plus le spectre d’analyse des recherches et des études produites. Les dimensions de l’impasse dans le domaine de l’incapacité se déclinent ainsi :

  • Juridique ;
  • Théorique et conceptuelle ;
  • Recherche et méthodologie ;
  • Clinique ;
  • Éthique.

La causalité multifactorielle, notamment les facteurs préexistants ou non reliés à l’objet de la demande d’indemnisation, ou celle de la demande de stratégie d’accommodation, ou celle de la demande de la mise en œuvre de stratégies d’adaptations, doit être reconnue. Il est nécessaire de reconnaître les dynamiques et les changements observables au cours du processus de formation de l’incapacité, plutôt que d’évaluer un simple résultat binaire de causalité. Incidemment, les exigences de l’environnement et le soutien disponible servent à évaluer l’incapacité.

Le système juridique est mal préparé pour intégrer la causalité multifactorielle, les changements qui se manifestent dans l’incapacité ainsi que les aspects psychosociaux et contextuels de l’incapacité. Les méthodes cliniques censées servir à distinguer les facteurs admissibles des facteurs qui ne le sont pas sont peu fiables. Les méthodes d’évaluation psychologique intégrant les facteurs sociaux, cognitifs, environnementaux et d’adaptation liées à l’incapacité n’en sont qu’à leur début.

L’incapacité professionnelle implique de multiples intervenants sociétaux, dont l’employeur, le système de santé, le régime d’assurance public et les membres de la famille, chacun ayant ses propres paradigmes d’incapacité et résultats escomptés de retour au travail. Le modèle écologique est axé sur les incidences fonctionnelles de la « déficience » et de l’« incapacité » en contexte des exigences sociales et professionnelles et des mesures de soutien.

La « déficience » peut être vue comme perte de l’usage ou dysfonction d’un membre ou d’une partie d’un organe ou perte de la fonction d’un organe. L’« incapacité » relève d’altération de la capacité d’une personne de répondre aux exigences personnelles, sociales ou professionnelles, ou aux critères prévus par la Loi.

Donc, la « déficience » est un « résultat relationnel » reflétant la capacité d’une personne de réaliser une tâche ou une activité particulière, en fonction des conditions environnementales (et contextuelle) dans lesquelles elles doivent être réalisées » (Brandt et Pope, 1997).


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